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Le Cercle du Genau
10 juillet 2009

Miroir, miroir ...

Pour mon premier post (je reprends ici ce que j'avais déjà écrit sur mon forum favori !) : Blanche Neige, de Prejlocaj, ballet vu au Deutsche Oper avec mes deux amies du Cercle du Genau, et que nous avons adoré toutes les trois.

blanche_neige_0

Le ballet était dansé par la troupe du Staatsballett Berlin, et les interprètes incarnaient leur rôle avec talent et passion. Pour nous trois, qui sommes très loin d’être des spécialistes de la danse contemporaine, nous sommes sorties ravies. Il faut dire que le ballet est accessible. Certes, il y a des passages un peu longuets (notamment les scènes au château, avec le corps de ballet), mais d’autres vraiment sublimes (pas de deux entre Blanche-Neige et le Prince par exemple).

Pour commencer, une petite photo des répétitions (on voit le chorégraphe sur la droite, devant le miroir)

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Voici ce que Angelin Preljocaj écrit (source : www.preljocaj.org) à propos de son ballet :

"J'avais très envie de raconter une histoire, d'ouvrir une parenthèse féerique et enchantée. Pour ne pas tomber dans mes propres ornières sans doute. Et aussi parce que, comme tout le monde, j’adore les histoires. Je suis fidèle à la version des frères Grimm, à quelques variations personnelles près, fondées sur mon analyse des symboles du conte. Bettelheim décrit Blanche Neige comme le lieu d’un œdipe inversé. La marâtre est sans doute le personnage central du conte. C'est elle aussi que j'interroge à travers sa volonté narcissique de ne pas renoncer à la séduction et à sa place de femme, quitte à sacrifier sa belle fille. L’intelligence des symboles appartient aux adultes autant qu'aux enfants, elle parle à tous et c’est pour cela que j'aime les contes.
Blanche Neige est un ballet narratif, avec une dramaturgie. Les lieux sont représentés par les décors de Thierry Leproust. Les 26 danseurs de la compagnie incarnent les personnages dans des costumes de Jean Paul Gaultier.
"
Ajoutons que la musique est une alternance d’extraits de Mahler et de musique électroacoustique. Ce mélange des genres ne choque pas du tout, et convient parfaitement aux changements d’atmosphère, de décors, de lumière (d’ailleurs, j’en profite pour dire que la mise en lumières est vraiment géniale).

A présent, je vais vous raconter un peu plus dans le détail ce que j’ai aimé, en suivant (plutôt devrais-je dire en tentant ) de suivre l’ordre narratif du ballet, qui suit celui du conte des frères Grimm.

Le ballet commence par la naissance de Blanche-Neige. Le plateau est vide, et la mère de Blanche-Neige, toute de noir vêtue, s’avance difficilement. On sent toute la douleur de l’enfantement à travers ce chemin difficile vers la vie (naissance de sa fille) et sa mort. J’ai vraiment retenu mon souffle pendant toute cette diagonale si lente, si pénible, dans la solitude (et si bien incarnée par la danseuse).

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Puis le père prend sa fille dans ses bras, et le bébé devient petite fille puis jeune femme. Petit commentaire au passage sur le costume de Blanche-Neige. J’adore vraiment le jeu sur la transparence et le côté nu, mais par contre, je n’aime pas du tout le devant du costume qui, pardonnez-moi d’être si prosaïque, fait couche-culotte.

Je trouve que tout ce début de ballet s’inscrit dans la tradition des grands ballets classiques : le tout début assez sombre me fait penser à la transformation de la princesse en cygne par Rothbart dans Le Lac des Cygnes. Puis le « premier acte » me fait penser à beaucoup de ballets classiques : le corps de ballet qui danse ensemble au château, avec souvent les hommes qui enchaînent une série de sauts impressionnants, les filles qui dansent aussi de leur côté...

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... et avec le danseur principal et/ou l’héroïne qui font leurs premiers pas.

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C’est aussi là que le Prince et Blanche-Neige se rencontrent.
Au premier abord, le costume du prince en orange fluo avec bretelles est assez étonnant mais on s’y fait … D’ailleurs, je trouve cela intéressant de jouer à fond la carte du cliché « rose bonbon » des contes de fées et d’aller dans des couleurs mettant en évidence/dénonçant le cliché !

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Puis l’arrivée de la méchante belle-mère, sorcière de son état m’a directement rappelé l’arrivée de la Fée Carabosse avec ses rats dans La Belle au Bois Dormant. Une première partie un peu longue, avons-nous trouvé. Mais l’interprétation était vraiment superbe (la danseuse avait beaucoup de talent ! il est souvent difficile je trouve de donner corps et vie à ses personnages méchants, et d’aller au bout de toutes les intentions et tous les mouvements, de donner l’énergie nécessaire pour faire donner des frissons de peur au public !).

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L’arrivée de la belle-mère s’ensuit d’ailleurs d’un changement de décor de l’apparition du fameux miroir magique.

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Blanche-Neige en se promenant dans la forêt, va tomber sur des sortes d’esprits des bois (c’est ainsi que je l’interprète) et de nymphes, avec qui elle va danser. Puis elle va aussi retrouver son prince. Et là, c’est le premier coup de foudre pour moi : ce pas de deux, comme les autres pas de deux entre le prince et Blanche-Neige sont extraordinaires. Pour moi (et mes amies d’ailleurs), le temps était suspendu pendant ces moments-là. Et pour moi, Preljocaj est un génie des portées, absolument sublimes.

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Mais voilà, la sorcière est là à surveiller son miroir magique, et ce n’est plus est la plus belle … Alors elle demande à trois chasseurs de rapporter le cœur de Blanche-Neige…

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J’ai beaucoup aimé le décor de la forêt (je n’ai malheureusement pas d’image) ainsi que la mise en lumière. On ressent vraiment bien l’atmosphère grâce à ces éléments. La scène des chasseurs et de Blanche-Neige est bien rendue : on sent la peur de Blanche-Neige, la manière dont elle est prise au piège. Encore une occasion de faire de magnifiques portés au passage … (désolée de me répéter, mais je n’ai pas fini de louer la beauté des portés de ce chorégraphe ! ). Les chasseurs ne peuvent pas aller au bout de leur geste et poignarder Blanche-Neige. Alors ils la laissent s’enfuir entre les arbres. Et survient la biche qui dont le cœur sera offert à la sorcière. Symbolique ou non, la biche, avant d’être tuée, suit la même diagonale que la mère de Blanche-Neige avant sa mort…

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Mais la méchante sorcière le voit … Et elle décide d’empoisonner Blanche-Neige, prépare la fatale pomme et se déguise en vieille dame …

Pendant ce temps, Blanche-Neige a fui sans savoir où elle allait. Et rencontre les 7 nains. Ces derniers ont vraiment été très appréciés du public ! Suspendus à des fils, ils virevoltent comme des acrobates sur le mur de fond, décor de montage agrémenté de trous desquels ils entrent et sortent (comme vous pouvez le voir dans l’extrait). Tout l'espace scénique est ainsi occupé. Quelle ingéniosité ! Et ça marche !
Ils trouvent alors Blanche-Neige endormie.

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J’aime le passage où Blanche-Neige tente de s’intégrer à leur groupe, en entrant progressivement dans leur danse, d’abord en regardant, puis en tentant, en hésitant, en recommençant, puis en dansant à part entière avec eux.

Mais l’histoire suit son cours, et la méchante belle-mère retrouve Blanche-Neige. Elle tente de l’attendrir. L’innocente jeune femme aide alors la vieille. Celle-ci la convainc à prendre la pomme. Une fois que celle-ci accepte de la prendre et de la croquer, la sorcière se découvre. La scène est violente, on sent que la sorcière est en train de tuer Blanche-Neige.

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Et Blanche-Neige est laissée là pour morte. Avant que les nains ne la trouvent, une forme noire descend du ciel… C’est la mère de Blanche-Neige. Moment magnifique et triste… Pendant tout ce passage, la danseuse qui incarne la mère reste suspendue. A un moment, elle prend sa fille dans ses bras, et la soulève lentement, avant de la reposer. C’est tellement beau : ce mélange du blanc et du noir de leurs costumes respectifs, ce mariage de la vie et de la mort, cette brève rencontre entre la mère et la fille…

Puis les nains retrouvent Blanche-Neige et la mettent dans son cercueil de verre. Plus précisément, ils la déposent sur une plaque transparente, symbolisant le cercueil. Le prince retrouve alors sa bien-aimée … Mais elle est morte. S’ensuit un pas de deux sublime pendant lequel le prince danse avec Blanche-Neige, dont le corps est complètement détendu, comme si elle était morte. Ce passage est très impressionnant. On ressent toute la douleur du prince. Et les portés sont vraiment très beaux.

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Heureusement qu’il pense à l’embrasser ! Car Blanche-Neige peut alors revenir tout doucement à la vie...

Comme dans les grands ballets classiques, on revient alors à la cour du roi pour le mariage. Tout le monde est là pour célébrer le bonheur du couple.

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Et le ballet s’achève, un peu comme le conte des frères Grimm, sur la méchante sorcière qui est punie et ici condamnée à danser (d’ailleurs cette danse m’a un peu fait penser par certains côtés au Boléro de Béjart).

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Un peu moins de 2h de rêve …

Fleur de serre

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